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BB Jacques – « Poésie d’une pulsion »: Lyrisme instinctif

Il fait partie des révélations de la fin d’année 2021. BB Jacques revient en 2022 avec un nouvel EP intitulé « Poésie d’une pulsion ». Un projet puissant tant lyricalement que musicalement sur lequel il impose son univers. Chronique du dernier projet d’un rappeur pas comme les autres.

C’est bien connu, en France, on a l’habitude de tout mettre, même l’art, dans des cases. Il en va de même pour le rap. Et il faut dire que les artistes actuels ne nous aident pas à sortir de cette façon de faire. En effet, parmi les multiples projets qui sortent chaque vendredi, on ne compte plus ceux qui se ressemblent énormément. Heureusement, quelques artistes se différencient de la masse en proposant des choses moins formatées.

C’est le cas de BB Jacques qui a sorti « Poésie d’une pulsion » en ce début Février. On a ici affaire à un 11 titres qui tranche avec ce que l’on a l’habitude d’entendre régulièrement. D’ailleurs, Black Bird Jacques ne veut pas qu’on l’entende, il veut qu’on l’écoute. Et c’est pour cela qu’il propose un EP réfléchi et travaillé. Le gagnant du concours organisé par Groover en collaboration avec le chroniqueur Sale est en effet une bête de travail. Quelques  mois après avoir sorti 3 EP qui réunis ont donné naissance à l’album « La nuit sera calme », il récidive donc avec un nouveau projet très abouti. 

Instinct littéraire

Ce qui fait la particularité de « Poésie d’une pulsion », c’est la finesse de l’écriture de BB Jacques. Ce féru de littérature emploie un vocabulaire bien plus large que la plupart de ses confrères. Mais cette écriture,qui pour un romancier est mûrement réfléchie, est instinctive chez Jacques. C’est d’ailleurs ce qu’il clame dès le début de l’EP en répétant plusieurs fois « Il faut qu’j’écrive ». 

On ressent effectivement un réel besoin de sortir ce qu’il a dans la tête et surtout sur le cœur. Cet opus où il parle d’amour,de conquête, de rupture ou de sa musique est empreint d’une mélancolie palpable. Il n’hésite d’ailleurs pas à citer Nessbeal en rappant qu’à chaque jour suffit sa peine. Ainsi, il démontre un attachement certains au rap et à sa culture qu’il ne veut pas que l’on réduise à Fred de Sky. Il est même capable de paraphraser Booba en reprenant un extrait de son titre « Baby » en feat avec…Nessbeal. Dans un style complètement différent, le côté très mélancolique et désabusé le rapproche de NE2S. 

Mais arrêtons là le jeu des comparaisons. Comme dit au début de cet article, le Libanais de naissance est unique et inclassable. Il est fort et il le sait. Comme tout rappeur qui se respecte, il n’hésite pas à louer ses propres mérites en parlant de lui même à la troisième personne et à se revendiquer au dessus des autres rappeurs. La différence se situe dans la façon de le dire en mettant l’écriture au dessus de tout. Le dernier morceau du projet « Sky on the rocks » en est la parfaite illustration. Quand il s’y vante, c’est en précisant que ce n’est pas de l’egotrip mais de la clairvoyance. Et en clamant également, que pour être le plus fort, il n’a « pas besoin d’autotune mais juste qu’on le laisse seul avec 20 consonnes et 6 voyelles ». Tout est dit. 

On pourrait encore énumérer un bon nombre de phases incroyables de « Poésie d’une pulsion » tant BB Jaques écrit merveilleusement bien. On vous laisse écouter plusieurs fois le projet pour que vous appréciiez par vous même les multiples phases à tiroir qui le remplissent. Alors oui, la plume de l’artiste est de haute qualité. Cependant, « PdP » n’est pas un recueil de poésie. Puisque l’on parle ici d’un projet musical, il faut donc parler musique.

Poésie et musicalité

Et c’est là que la performance prend toute son ampleur. En effet, le poète parisien rappe bien, voir très bien. Il respecte tous les fondamentaux de son art mais y ajoute une grande touche d’interprétation. L’auditeur capte ainsi la rage, l’ambition, la tristesse et parfois le dépit que BB Jacques veut faire passer. Une palette d’émotion qu’il lâche de manière impulsive sur ses sons, un peu comme s’il peignait. Un fait qu’illustre bien la cover de l’EP.

Les prods ne sont pas en reste. Résolument modernes et planantes, elles sont l’écrin parfait à la poésie impétueuse de Jacques. Cette combinaison entre textes imagés, interprétation de haute tenue et prods ensorcelantes procurent à « PdP » un côté hyper cinématographique. Il n’y a qu’à écouter des titres comme « Carte postale », « Dystopia » ou « Mégot sur trottoir » pour réaliser le soin que BB Jacques et son entourage dont l’ingé son et beatmaker Pense ont apporté à la réalisation de ce disque. 

Pour conclure, vous l’aurez compris, à la rédaction d’Ignr, cet opus est un véritable coup de cœur. Et il y a fort à parier que nous ne serons pas les seuls à être sensible à ce mélange de rap pur, de poésie et de musicalité pointue que nous propose BB Jacques sur « Poésie d’une pulsion ». Un projet à écouter et à réécouter par un artiste à suivre de très près.

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