Catégories
Dossiers

« KLR » du Saïan Supa Crew: Objet rappé non identifié

Il y a bientôt 22 ans, un collectif formé de rappeurs un brin déjantés sortait un album complétement hors norme qui fera date dans l’histoire du rap hexagonal , voir même de la musique française tout court. Retour sur « KLR » du Saïan supa crew, véritable objet rappé non identifié.

Le collectif Saïan supa crew  a été formé en 1997. Il est composé de 7 membres qui forment plusieurs groupuscules. Feniski ( qui deviendra Féfé),  KLR et Vicelow forment OFX, Specta et Leeroy Kesiah forment Explicit Samouraï tandis que Simple Spirit réunit Sir Samuel et Sly the mic buddah.

Les 7 rappeurs apprécient particulièrement le rap us et en particulier   Busta Rhymes et son Flipmode squad, le Boot camp click ou encore Pharcyde. Des artistes qui ont en commun un style très marqué et donc moins typés « Mobb deep » qui est une des influences marquantes du rap fr des années 90/2000.

C’est d’ailleurs toutes ces influences qui ressortent de leur 1er maxi «Saïan  supa land », un projet plein d’inspirations musicales variées, d’énergie et d’humour. L’énergie que ce soit sur disques et encore plus sur scène ainsi que l’éclectisme ,c’est réellement ce qui fait la force de ce groupe issu des 4 coins de l’île de France qui sortira l’éponyme « Saïan supa crew » ( 6 titres) début 99.

Des forces que l’on retrouve sur le premier album du Saïan, « KLR », sorti en octobre 99. Le nom de ce projet est un hommage au rappeur du même nom, membre du groupe disparu tragiquement dans un accident de la route en 1998.

L’album s’avère être un ovni dans le paysage rap français de l’époque où ce dernier est très influencé par l’école time bomb et des morceaux faits de boucles de violon et de piano.

La cover elle même est déjà atypique pour la fin des années 90’s. On y voit les 7 membres du groupe représentés façon « animé », grimés en Ninja et armés de matériel scolaire , le tout sur fond jaune et bleu qui sont les couleurs du groupe!

Pourtant « KLR » n’a rien de scolaire. Si certains titres sont dans la lignée des productions de la fin des 90’s ( la preuve par trois…), d’autres rappellent grandement les influences US citées précédemment ( Raz de marée, abécédaire des cons…). Ce qui marque fortement le public de l’époque, ce sont leurs coups de folie musicaux où le groupe ose des morceaux orientés soul, bossa nova voir même zouk qui feront hurler les puristes.

Les fans de rap n’apprécient pas forcément ces  titres que l’on mettrait aujourd’hui dans la case Zumba et que l’on retrouverait dans beaucoup de projets de 2021. Comment ne pas citer évidemment, l’énorme tube « Angela », morceau de « zouk-rap » hyper graveleux qui fera danser tout le pays et hurler les parents à cause de ses paroles crues. Un titre d’ailleurs « repris » par Hatik plus de 20 ans après.

Éclectique mais Hip Hop

Cet album conserve un esprit résolument Hip Hop même si il est novateur et empreint de toutes les influences musicales dues au mélange et aux origines des membres du groupe! En effet, malgré la diversité des prods, « KLR » conserve une certaine homogénéité musicale dans sa couleur puisque tous les titres sont produits par Alsoprodby ou alors DJ Fun qui est le DJ du groupe.

Mais on ne peut pas réduire le groupe à son éclectisme musical et à sa douce folie. Le Saïan sait aussi aborder des thèmes qui sont les mêmes que ceux traités par les autres rappeurs mais en y apportant une part d’autodérision et un humour original et décalé. Le racisme, la bêtise de l’être humain, les langues de putes ou encore le trafic de drogues dures sont des sujets que l’on retrouve dans tous les albums de rap mais eux, le font avec la touche Saïan.

Cette touche n’est pas que textuelle, elle est aussi dans la forme. Le crew a un style bien à lui. Les 6 membres du groupe ont des façons de rapper bien distinctes, propres à chacun des membres du groupe et ne cherchent pas à faire comme les autres. Les flows sont rebondissants, parfois accélérés, les syllabes appuyées à l’extrême et les passes passes multipliés. Un espèce de grand bazar organisé qui apporte ce coté spontané qui fera le succès et la singularité du groupe.

Certains en seront fans, d’autres détesteront! Peut être que le collectif était un peu trop en avance sur son temps pour le public strictement rap. Un public qui préférait alors un rap plus revendicatif et engagé socialement. Toujours est il que l’on peut considérer « KLR »  ( 600 000 exemplaires vendus) comme un des albums marquants de la fin du 20e siècle qui a marqué une époque et ouvert la voix à d’autres groupe cherchant à élargir le spectre du rap français.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *