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Sam’s – Inspiré d’histoire(s) vraie(s)

Plus de 2 ans et demi après son dernier projet, Sam’s revient avec un nouvel album. Celui qui explose les records en tant qu’acteur avec la série Validé avait à cœur de montrer à tous ceux qui ne le connaissaient pas qu’un vrai rappeur se cache derrière Mastar, le personnage de fiction. C’est donc avec un album inspiré d’histoire(s) vraie(s) que Sam’s fait son retour dans les bacs.

Il y a des rappeurs qui endossent des rôles ou se créent des personnages pour le contenu de leurs albums. Sam’s lui n’a pas besoin de s’inventer de vies. En effet, il en a déjà vécu plusieurs. La vie de Moussa Mansaly est un vrai film. Il a touché du doigt son rêve de devenir footballeur pro. Puis, comme ce rêve s’est effondré, il est revenu chez lui à Bordeaux et a essayé de gagner sa vie avec des moyens pas toujours légaux. Par la suite, il a embrassé avec succès une carrière de rappeur avant de voir s’ouvrir devant lui les portes du cinéma. Un véritable scénario de film.

Toutes ces activités pourraient rendre n’importe quel humain schizophrène. Le bordelais de 37 ans raconte d’ailleurs dans une interview que les gens l’interpellent en utilisant plusieurs noms. Parfois Mastar ( vous aurez la réf…), de temps en temps « Moussa mec de mon bâtiment » ( référence à son rôle dans le film La vie scolaire) ou encore Sam’s. C’est à cette dernière identité et à son dernier album que l’on va s’intéresser.

Alors si beaucoup l’ont découvert dans la série Validé, Sam’s n’est pas un acteur qui profite de sa nouvelle notoriété pour se lancer dans une carrière de rappeur. Non, il est là depuis bien longtemps. Sa « Go fast mixtape » date en effet de 2009. Il a également sorti plusieurs projets chez Bomaye Music, label de Youssoupha durant la décennie 2010. Mais malgré un niveau bien au dessus de certains autres rappeurs français, il n’a pas eu le succès mérité.

Il y a peut être un lien aussi avec la période creuse , commercialement parlant, pour le rap fr entre 2010 et 2015. Justement en 2015, le bordelais sort son premier album « Dieu est grand ». Et là aussi, le succès est surtout d’estime. En tout cas, il n’est pas à la hauteur de la qualité de la galette. Pourtant, l’album est excellent et est digne de faire parti des meilleurs albums sortis cette année là. 

« Dieu est grand » sorti en 2015

Occupé depuis par ses nouvelles activités d’acteur, Sam’s décide donc de revenir en 2021 avec un nouvel album intitulé « inspiré d’histoire(s) vraie(s) ». Les mauvaises langues diront qu’il le fait parce que cela lui permettra de surfer sur le succès de Validé. Lui, vous répondra qu’il attendait d’avoir des choses à dire. Il ne pouvait décemment pas tomber dans la facilité et nous sortir un album de rap de grossiste sans aucun fond. Surtout que le cinéma le nourrit probablement mieux que le rap et qu’il ne traîne plus en bas du bâtiment. Non, en bon perfectionniste, il voulait juste prendre le temps de livrer un album abouti.

Pochette de « Inspiré d’histoire(s) vraie(s) » par Fifou

Quand Sam’s a balancé le teaser très cinématographique de « inspiré d’histoire(s) vraie(s) », on aurait pu s’attendre à un album dans lequel il endosserait plusieurs rôles pour nous raconter plusieurs histoires. Une sorte de compilation de courts métrages. Et bien non! Surprise, on se retrouve face à ce que l’on pourrait qualifier de biopic. Un album d’un peu plus d’une heure, très personnel, dans lequel Sam’s nous raconte ses propres histoires. Pas de fiction donc.

Le côté cinéma se retrouve dans la façon dont est conçu l’album. Le sénégalais d’origine aime les albums avec un vrai fil conducteur. Il s’est donc inspiré de sa vie d’acteur pour conceptualiser son projet autour du 7ème art. De son titre, aux interludes narratives, en passant par le nom de certains morceaux ( « Plan séquence », « Caméra B »…), l’album a été réfléchi comme un film. Le film de sa vie.

L’exercice consistant à livrer un album aussi intimiste pourrait s’apparenter à un saut dans le vide comme sur la cover signée Fifou. Une cascade que le rappeur a réalisé lui même. Et s’il n’a pas peur de sauter, c’est parce que Dieu est grand. Et dans sa grandeur Dieu pardonne. Logique donc de retrouver la partie 2 de « QDNP (que dieu nous pardonne) » sur cet album. Sam’s n’a pas toujours eu une vie droite et il n’hésite pas à en parler sur plusieurs titres. 

Il ne parle pas que de ses erreurs. Il peut aussi se montrer engagé comme sur « Pour quelques dollars de plus » dont la prod et le contenu vous rappelleront le « Pour une poignée de Dollars » d’Ideal J. Sam’s y dénonce de façon très cinématographique, encore une fois, les violences policières.

Ses relations avec la gente féminine ont aussi leur place comme sur « Pirates contre Amazones » par exemple. Néanmoins, l’introspection retrouve vite son rôle central dans cet album. Sur « J’y pense, j’oublie » en feat avec Grand Corps Malade, il évoque ses proches disparus de façon touchante. « Les jours avancent », « Tellement de failles » et surtout le sublime « Au fond de la classe » sont peut être les sommets de l’album en terme d’exploration intime. En particulier sur ce dernier titre, où rappeur se met à nu et va jusqu’à mentionner ses épisodes dépressifs. Poignant…

Mais si comme on l’a dit, cet album est très personnel, il ne faut pas le limiter à une séquence de psychanalyse. C’est d’abord et surtout un album de rap! Et Sam’s avait à cœur de montrer à ceux qui n’auraient pas suivi le début de sa carrière qu’il savait rapper. 

Entre l’intro avec Niro, « Popo » avec Guy2Bezbar, le morceau avec Benjamin Epps ou le titre « Caméra B », il fait la démonstration qu’il est aussi à l’aise pour kicker fort derrière le micro qu’il l’est devant la caméra. 

Cependant, il ne faut pas s’attendre à retrouver le Sam’s de « Dieu est grand » ou de « Deus ex machina » sur l’intégralité de ce nouvel opus. Effectivement, le rappeur, s’il n’a pas profondément changé, a en revanche vieilli, muri et donc évolué. Une mutation qui se révèle logique compte tenu de sa nouvelle vie. Et ces nouvelles expériences engendrent forcément une évolution dans les textes mais aussi musicalement. Porté par les prods de Noxious, Richie Beats et surtout de Cehashi, Sam’s s’essaie à de nouvelles choses.

Le flow est parfois moins académique et daté années 2010. Quelques tentatives à un flow plus mélodieux, voir même chanté peuvent s’avérer déroutantes. « Paradise » en feat avec Hatik en est un bon exemple. Ce titre réunit toutes les conditions pour plaire aux oreilles d’auditeurs plus habitués à ce genre de sonorités et moins aux suiveurs de la première heure.

Au final, ces changements ne sont pas déplaisants. L’album parvient à garder une certaine cohérence de par son atmosphère musicale. Mais aussi grâce à ce fameux fil conducteur cher au Bordelais.

Avec « Inspirés d’histoire(s) vraie(s) », Sam’s montre que l’on peut sortir un projet cohérent tout en se livrant et en respectant la culture rap et ses codes. Cet album est la preuve que malgré les échecs, les aléas de la vie, en se relevant après les chutes et en y croyant dur ,on peut accéder à ses rêves. Et aboutir d’un projet de grande qualité. Un projet constitué d’histoires vraies et inspirantes.

Photo LP / Fred Dugit

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