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Les 15 ans de “Boulogne Boy” de Salif

Le 30 Avril 2007, Salif ravissait ses fans avec la sortie d’un nouveau disque nommé Boulogne Boy. Un projet dont la direction artistique tranchait avec celle de son premier album. Et ce tant dans le fond que dans la forme. A sa sortie, les avis étaient donc différents selon les personnes. Certains adoraient quand d’autres se montraient plus septiques. 15 ans après, cet “album avant l’album” occupe une place de choix dans la discographie du rappeur retraité. Retour sur ce classique du rap français.

En 2001, le jeune Salif sort un premier album surprenant à plusieurs point de vue. Tous ensemble, chacun pour soi est l’album d’une caillera capable de parler de la vie de rue et en même temps de montrer une sincérité bluffante lorsqu’il se livre. Il y évoque en effet ses relations avec ses parents, ses déboires amoureux, sa difficulté à choisir sa voie, ou ses problèmes d’alcool. Ce premier opus, produit entre autre par MadIzm, est une vraie masterclass pour un premier essai. 

Tout le monde attendait donc la suite avec impatience après cet album plein de promesses. Mais comme il le dira plus tard dans l’outro de son dernier album, le rappeur de Boulogne est un homme libre. Plutôt que de suivre les envies du public, il décide de consacrer les années qui suivent à des sorties collectives. On le retrouve sur les différentes sorties du label IV My People, dans lequel il est signé. En parallèle, il sort 3 albums du groupe Nysay qu’il forme avec son pote EXS

Le retour du Boulogne Boy

C’est seulement en 2007 que Fon revient avec un nouveau disque solo intitulé Boulogne Boy. En le définissant comme un “album avant l’album”, il met en avant en France le format du street-CD, qui devient une référence, alors que dans un marché du disque en pleine crise. Le nom de l’album s’inspire évidemment de l’ancien groupe de supporter du PSG. Et cela dit tout de l’ambiance générale que Salif souhaite donner à ce disque. Il revient en effet nettement plus énervé que sur son solo précédent. On oscille entre gros titre orienté dirty south (« Rue » et « Argent sale ») et du rap de rue ancré dans l’époque (« Yo-yo » « Remballe », « Ghetto Youth »). Il y a bien évidemment des morceaux moins nerveux, à la couleur musicale plus classique, comme « Enfance gâchée », « Jeunesse 2007 » ou « Paquebot ». Malgré ce statut de mixtape, Boulogne Boy est solide, homogène et extrêmement cohérent. 

La cohérence est tout d’abord musicale. A la production des 14 morceaux, on retrouve les beatmakers comme Skread, Boostabass, Drx, Fonkie KO, Tyran ou Instrumens, qui composent les différentes tendances du rap français de l’époque; bien que Salif importe une place première à juste faire la musique qu’il aime. C’est pour cela que cet album est fait à l’instinct. Afin de retranscrire au mieux sa philosophie de vie. 

Un album intemporel

La cohérence se retrouve également dans les thèmes abordés et surtout dans la façon de le faire. Il parle évidemment de son vécu de mec de tess mais sans jamais réellement en faire l’apologie. Il ne se montre pas non plus moralisateur. Et si une certaine forme de rage transpire de ce disque, les mots qu’il pose sur l’état de la jeunesse et sur la société française en générale sont d’une grande lucidité. Si bien qu’on pourrait ressortir certains textes de l’album en 2022, ils restent d’actualité. Si le discours est moins introspectif, l’authenticité et la sincérité sont toujours là. 

Et la qualité d’écriture est aussi toujours présente. Les schémas de rimes sont très pointus. Les métaphores sont légions et la profondeur des champs lexicaux utilisés est incroyable. Salif ne transige pas sur la qualité de ses textes. Pour s’en rendre compte, il suffit d’écouter « 92FM » ou « Paquebot ». Sur ce dernier, chaque situation qu’il dépeint à droit à sa métaphore en lien avec le monde marin. Vous n’avez qu’a admirer par vous même.

La suite de la discographie de celui qui quoi qu’on en dise, est un des plus grand rappeur que la France ait connu, confirme cette exigence cachée derrière une fausse nonchalance. Certes, Boulogne Boy n’est pas le disque le plus soigné ou le plus accompli de Salif. Il explique assez bien lui même dans l’outro que ce n’était pas son objectif. C’est juste le disque d’un homme qui avait envie de faire du rap comme il l’entendait. Et autant dire que nous aussi, nous l’avons bien entendu. Sans être forcément son meilleur projet, ce street-CD reste une pièce incontournable de la discographie de Salif, aka le Boulogne Boy.

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