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Benjamin Epps : Le théorème de  » L’art – ogance »

Il aura marqué de son sceau l’année 2021 avec plusieurs featurings et le très bon EP « Fantôme avec chauffeur » en collaboration avec Le chroniqueur Sale. En 2022, il continue sur sa lancée avec une nouvelle sortie. Benjamin Epps vient en effet de nous livrer son nouveau projet nommé « Vous n’êtes pas content ? Triplé ! » Il y reprend tout ce qui fait sa singularité. Un son très BoomBap, un flow particulier et une arrogance qui dérange. Et le résultat ne laisse par conséquent personne indiffèrent. Soit on aime, soit on déteste. Alors, pourquoi ce rappeur divise t’il autant ?

Il y a toujours des artistes au sujets desquels les avis divergent. Cela peut être dû à  un fossé de générations. Par exemple, PNL provoque une certaine fascination chez les plus jeunes quand les plus âgés pensent qu’ils ne font pas du rap. Il en va de même pour Jul qui débecte les amateurs de rap à l’ancienne allergiques à l’autotune. 

 Il y a aussi les petites guerres de fan bases entre les pro Booba et les aficionados de Rohff. Surtout que ces 2 rappeurs, particulièrement le Duc, ont un goût certain pour la provocation et les clashs. Bref, il peut y avoir de nombreuses raisons pour qu’un artiste divise et déchaîne les passions.

Epps, on aime ou on déteste

En ce moment, Benjamin Epps fait beaucoup parler et provoque bon nombre de débats sur les réseaux sociaux. Beaucoup lui reprochent de copier outrageusement le flow et la voix de Westside Gunn là où d’autres le remercient et se réjouissent de voir un jeune rappeur talentueux remettre le BoomBap sur le devant de la scène rap hexagonale. Il en reprend d’ailleurs tous les codes, que ce soit dans la façon de poser, dans l’égotrip ou dans l’art de clasher. Et c’est à priori avec ces deux derniers points que le rappeur gabonais se fait des ennemis.

 Epps demeure un jeune artiste qui cherche à se faire sa place dans le rap Game français. Mais il est déjà très sûr de lui et n’hésite pas à citer la concurrence dans ses textes avec des phrases plus ou moins bien senties. Par exemple, dans son dernier EP, il s’est fendu d’une petite punchline de mauvais goût  sur la rappeuse Lala&ce. Une phase qui n’aurait sûrement pas fait parler d’elle si elle avait été balancée il y a 10ans, mais c’est un autre débat. Sur ce même projet, il n’hésite pas à dire que « les rappeurs sont déclassés par Sch, Jul et Naps ». Alors, déjà que son style un peu rétro ne parle pas à tout le monde, si il commence à toucher à la sainte Trinité Marseillaise, il ne peut évidemment que s’attirer une tonne de reproches. À vous de voir si il a raison ou pas. 

Cela semble logique qu’une partie du public rap actuel ne soit pas réceptif à la musique de Benjamin tant ses références et sa musique sont éloignées de ce qui cartonne aujourd’hui en radio. Mais en plus, le contenu de ses textes est lui aussi loin de ce qui est le plus « streamer ». On ne retrouve pas chez lui d’apologie de la rue ou de la drogue. Pas non plus de longs couplets dans lesquels il parle de ses signes extérieurs de richesse. Non, Epps, C’est un poil de conscience pour beaucoup d’arrogance. Et c’est certainement ce qui dérange le plus.

Art de l’arrogance

Benjamin veut prendre le trône. Il fait penser à Samuel Eto’o, autre africain dont le talent était indéniable mais qui énervait pas mal de monde par son côté sûr de lui et arrogant. Tout comme Eto’o, il est persuadé d’être le meilleur. Comme le camerounais, il peut  parler de lui à la 3ème personne. Comme lui, il est habité par une énorme soif de réussir. Et enfin à l’instar de l’ancien lion indomptable, sa personnalité l’empêche de faire l’unanimité malgré un niveau bien au dessus de la moyenne. 

 Epps ne craint personne et son arrogance dérange forcément dans un rap Game de plus en plus aseptisé où chacun joue un rôle de son côté en faisant bien attention de ne froisser personne. Pourquoi Benjamin Epps n’aurait il pas lui aussi le droit de jouer son rôle ? 

On peut aussi penser que le Gabonais a oublié d’être stupide. Se sachant dans un style qui n’intéresse pas une grande partie de l’auditoire actuel, on peut se demander si tous les piques qu’il envoie ne sont pas juste destinés à faire parler de lui. Ce serait en somme une sorte de stratégie marketing. Technique qui pour le coup a l’air de fonctionner. Mais celle ci lui attire donc les foudres des fans des artistes qu’il vise. Paradoxalement, pour ces artistes en questions, le nouveau public nous dit que le rap évolue et qu’il faut favoriser le fond à la forme. Et alors, la forme, ça donne quoi chez Eppsito ?

Un univers à affiner pour faire l’unanimité

« Vous n’êtes pas content ? Triplé ! » est un EP de 8 titres. Le titre est inspiré d’une déclaration d’un autre footballeur à l’égo assumé, Kylian MBappé. Il est majoritairement produit par Just Music Beats. Seuls Sperrow, Dayzell The machine et JeanJass (Tout droit de la banque) s’immiscent aussi derrière les machines. Le morceau produit par le pote de Caballero est d’ailleurs un des meilleurs tracks de l’EP. Epps y montre vraiment ce qu’il a dans le ventre en tentant d’y imposer son propre style. Car si on l’a souvent accusé de plagier WSG, « Vous n’êtes pas content? Triplé » matérialise toute l’inspiration que représente Jay Z pour Benjamin Epps. Que ce soit via un scratch sur « BMW Boys » ou bien la phrase « Puis je avoir un encore » qui débute le titre « Encore », l’ombre de Jigga plane au dessus de cet opus.

Epps cultive de toute façon à fond ce délire « rap US des 90’s ». Et la couleur était annoncée dès le premier extrait « ce que le pips demande » qui avait fait l’objet d’un Colors. De la prod, au texte plein d’ego en passant par sa tenue, tout est calculé. A la manière d’un Laylow ou de PNL, il cultive son propre univers. Et il est évident que chacun est libre d’apprécier ou non.

Certes, Benjamin Epps gagnerait à ajouter un peu de profondeur à ses textes pour nous servir plus de titres du calibre de « Dieu bénisse les enfants ». Et il sera sûrement moins clivant quand son egotrip sera plus subtil. Mais il est encore jeune et cela viendra sûrement avec le temps. Il serait en revanche malhonnête de nier le talent du rappeur que l’on accroche ou pas. Le temps nous dira s’il mérite le trône qu’il réclame avec arrogance.

3 réponses sur « Benjamin Epps : Le théorème de  » L’art – ogance » »

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