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Selec’son rap français de juin 2023

La scène rap francophone nous a gratifiée de jolis projets pour ce début d’été. Si la Saison 00 de Luidji a occupé nos oreilles depuis sa sortie, c’est vers 3 projets que nous nous tournons. Baiser de Wallace Cleaver, Liaisons Dangereuses d’Esso Luxueux et Diamond Tears de Sofiane Pamart et YG Pablo font partie de notre sélec’son rap français de ce mois de juin 2023.

Wallace Cleaver tout en finesse

Notre première rencontre avec Wallace Cleaver date de l’année dernière, dans l’album de Keroué, Eckmühl. Sur « vert violet », l’artiste signe une performance où sa voix résonne avec une certaine délicatesse. Pourtant, Wallace Cleaver est actif depuis 2018. Il lui aura fallu 4 ans pour atteindre nos oreilles, mais aussi développer sa musique afin qu’elle atteigne le plus grand nombre. En ce mois de juin 2023, il a offert au rap français son premier album, Baiser.

Wallace Cleaver est un rappeur parisien managé par l’ex-rappeur Eden Dillinger. Pour préparer cette sortie d’un long, il a été actif toute l’année avec de multiples singles. Parmi ces morceaux, « Benelli828 », le featuring avec Django, a été particulièrement marquant. Mais le rappeur a connu un accélérateur important puisqu’il occupe la tête d’affiche du Grünt 57. Entouré de Mairo, Sheldon ou encore Eden Dillinger, qui réchausse les crampons, Wallace Cleaver démontre tout son talent de rimeur.

La hype ne fait qu’augmenter au moment de l’annonce de la tracklist de l’album. Si bien que les précommandes atteignent 1000 ventes dans la semaine. Sur twitter, le rappeur parisien connaît une certaine propagande.

Au cœur de l’album « Baiser »

Dès l’intro « çalavie », morceau le plus plébiscité, aux sonorités new genre présente toute l’étendue du talent du rappeur. Pourtant, ce n’est pas la seule étincelle du projet. Les textes sublimés par l’interprétation presque poétique, proche du slam dans « Merci pour la douleur » ou encore « de rien pour la douceur » amènent une ambiance sereine, presque touchante. Wallace Cleaver ouvre son cœur et se dévoile. 

« Ne me dis pas que t’as pas chaud au cœur, mon amour ton pull il crame. »

« Le cœur à papa » feat Sheldon

On a également su apprécier la diversité des propositions musicales. Le feat avec Django laisse place à une prod aux influences drill. Tandis que sur « est-ce que je l’aime ? » ou « le cœur à papa » avec Sheldon, les prods minimalistes laissent place à la voix. Le W propose un art assez développé et travaillé pour ne pas être redondant et ennuyant sur un format de 40 minutes. La ligne directrice est agréable et oscille entre les performances fulgurantes de rap et des morceaux plus pop qui accompagnent l’oreille. 

Il ne fait aucun doute que Baiser trouvera sa richesse dans le temps. Sans être flamboyant, le rappeur est plutôt apaisé en nous présentant un beau projet.

Le réveil d’Esso Luxueux

Esso Luxueux fait parti des rappeurs connus du circuit depuis longtemps, mais dont la discographie reste toujours vierge. Pourtant, à l’image d’un Suikon Blaz AD, Esso Luxueux n’a jamais rien sorti en solo. Pour autant, le rappeur du 19e, proche de Jazzy Bazz avec qui ils formaient la Cool Connexion, a toujours été louer pour son talent. Cette année, il quitte définitivement le FC Discret avec la sortie de son premier solo, Liaisons Dangereuses. Sur ce premier LP, il a fait appel à deux maîtres de la rime, à savoir Isha et Deen Burbigo. Et une troisième avec celui qui propose les top lines les plus léchées du jeu, Edge. 

L’avantage d’Esso est qu’il a hérité d’une petite fan base, grâce notamment à ses énormes performances en featuring. Ainsi, celui qui nous avait déjà choqué sur la Saboteur Mixtape, reprend les mêmes codes et se pare de ses plus beaux flows nonchalants. Sa voix est grave et ses phrases peu mâchées dans le sens propre comme figuré. L’impression qu’il n’articule pas donne à son phrasé un goût unique. Comme une seule vague, il se distingue complètement d’un Deen ou d’un Isha pour qui les consonnes sont appuyées afin de séparer les mots et rimes. Esso prête moins d’importance à ça mais s’applique plus sur ses mélodies tout en gardant un côté rappé.

Ce côté désinvolte, on le retrouvait déjà sur Private Club, l’album commun fait avec Edge et Jazzy Bazz en 2021. Un disque qui lui avait permis de se remettre veritablement en scelle. Il ne ressemble a personne et se distingue dès sa première rime. Les refrains sont particulièrement prenants, celui de « 10 grammes » avec la jolie flûte reste en tête. Tout comme ceux de « Non fumeur » ou « Dirty Diana ». Liaisons Dangereuses est la jolie surprise du mois de juin. L’album a été annoncé et publié rapidement. Il apparaît comme une cerise sur le gâteau. Parfait pour se mettre en jambes avant la sortie de OJISAN V2 de son compère Deen Burbigo qui a d’ailleurs lâché un couplet acéré sur « Aaliyah ». S’il crache autant de feu sur son EP en juillet, nous parlerons de Deen dans la sélection du moins prochain. 

L’alchimie entre Pablo et Sofiane

Propulsé en haut des charts durant le confinement avec AVM, YG Pablo a vu sa côte explosé grâce à un unique couplet sur QALF de Damso en 2020. Après cela, le rappeur bruxellois se fait plus rare, voir attendre par le public. 

Il réapparaît en début d’année avec Kiss and Tell. Il rempile avec un autre, Diamond Tears sorti en juin 2023 en collaboration avec le pianiste Sofiane Pamart. 

Lors des dernières années, le rap se voit être de plus en plus instrumentalisé. Et surtout les sonorités sont de plus en plus ouvertes, on assiste donc à des concerts de rap ou les dj sont remplacés par un pianiste, batteur, saxophoniste ou violoniste. L’organique reprends de l’importance et ce n’est pas sans nous plaire. 

Ainsi, un projet commun entre un musicien et un rappeur ne pouvait que nous toucher. Surtout si le pianiste fétiche du rap français qui a travaillé avec Dinos, Laylow, Josman, Isha ou BB Jacques s’allie avec la nouvelle tête du rap Belge. 

Diamond Tears nait donc d’une alchimie, d’une formidable entente entre les deux artistes. Ils l’expliquaient avec Mehdi Maizi dans « Le Code ». Le morceaux se sont fait très rapidement et le projet a été bâti en moins de 2 semaines. 

Si souvent la vitesse n’est pas gage de qualité. Ici, leur entente prend le dessus. 

Diamond Tears a même dépassé le rap et s’est vu être la sujet de plusieurs émission radio donc France Inter. En effet, le pianiste ne se cantonne pas au rap et sa notoriété plus large a servi ici à propulser le projet en dehors du public du rappeur belge. 

L’album en lui même est riche. Le piano omniprésent permet à Sofiane de s’exprimer mais sans être redondant. S’il est une référence dans les chansons mélancoliques et nostalgiques, ici seulement une seule l’est. Ils se se répètent pas et ne sont pas tombé dans le « trop facile ». 

Ainsi, les sonorités diffèrent et le piano s’adapte. Il est rare d’entendre le Piano King sur ces terrains et ces couleurs musicales. Non ne pouvons qu’admirer sa patte et sa capacité d’adaptation. 

Concernant le rappeur YG Pablo, il a aussi été « victime » de cette alchimie. Ses mélodies et toplines sont percutantes, rentrent en tête. On pense évidemment au single Magie publié quelques semaines avant la sortie et au seul featuring du projet : 22h22 ft Josman. 

Ils ont réussi à capter la vibe du moment et cuisiner un hook, ce refrain d’enfer qui ne nous quitte plus. 

22h22, j’repense à toi.

22h22 ft Josman

le risque d’être redondant sur un 16 titres était élevé. Jamais le rappeur belge n’avait proposé un album aussi long. C’était aussi une étape pour lui, qu’il a relevé avec brio. Les textes par exemple semblent plus matures et réfléchis, même s’il affirme avoir suivie son instinct et écris sur le moment. 

Ici, nos morceaux préférés se nomment Lune. Le seul morceau aux tons mélancoliques. 

Cotton club dont le piano de Sofiane Pamart nous transport dans un club americain. 

Et ascenseur. Plutôt péjoratif « ascenseur » comme thème pour décrire une musique, n’est ce pas ? Pourtant les deux artistes ont réussi à nous faire bouger les épaules sur quelques notes qui sonnent bateaux au début. Heureusement que YG Pablo chantonne, que la ligne de hats réchauffe et que Sofiane nous transporte. Encore. 

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